Le Soleil ni la Mort ne peuvent se regarder en face

 auteur

Wajdi Mouawad

 metteur en scène

Dominique Pitoiset

 date

du 16/09/2008 au 04/10/2008

 salle

Théâtre des Abbesses,
Paris

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Théâtre des Abbesses / Wajdi Mouawad

 liens

Théâtre des Abbesses

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Vaste entreprise à laquelle se livrent Wajdi Mouawad et son metteur en scène, Dominique Pitoiset : retracer, en une seule pièce, les trois histoires de Cadmos, Laïos et Œdipe, personnages centraux des Thébaïdes, ces pièces épiques retraçant les destinées des trois héros antiques. Écrite sur la commande de Pitoiset, Le Soleil ni la Mort ne peuvent se regarder en face fait donc preuve de l’ambition très élevée d’embrasser la quasi-totalité de l’histoire de Thèbes, de l’enlèvement d’Europe à la mort d’Œdipe, là où Sophocle, Euripide ou Eschyle y consacrent plusieurs tragédies.

Au-delà de cette condensation, il s’agit également pour Mouawad de mettre en lumière la contemporanéité des mythes, faisant de Cadmos l’annonciateur de la mort des utopies (alors qu’échoue son rêve d’une cité dans laquelle cohabiteraient autochtones et étrangers) et de Laïos la mort des désirs et pulsions (son penchant pour les jeunes garçons conduisant à la guerre et à la ruine de Thèbes). Ne reste alors qu’Œdipe, annonciateur de l’homme moderne, voire de la post-modernité et de son déterminisme chevillé au corps. Par une succession de tableaux faits de monologues pas forcément très intelligibles (l’ellipse et l’allusif sont légion), les trois comédiens vont incarner aussi bien ces trois figures que l’ensemble des personnages gravitant autour (divinités, femmes et enfants, ennemis et alliés). Comme dans ses textes précédents, les thèmes éternels de Mouawad s’imposent rapidement en sous-texte des épopées grecques : la guerre, l’exil et les problématiques familiales apparaissent comme autant de résonance de l’histoire personnelle de l’enfant né au Liban, arrivé en France à l’âge de dix ans avant de s’installer à Montréal.

Dans la lignée du texte, la mise en scène choisit aussi d’embrasser largement, convoquant pantomimes (des pantins, figures universelles et intemporelles, sont manipulés au début de chacun des trois actes), dessins animés projetés sur un écran au milieu du plateau, construction pas si éloignée d’une série télévisée (chapitrage des tableaux, héros bien identifiés, « à suivre… » projeté à la toute fin de la pièce) et travail sur l’envers du décor (costumes, perruques et miroirs sont disposés de part et d’autre de la scène). Cependant, cette volonté s’accompagne malheureusement dans la dernière partie de quelques facilités qui semblent alors desservir le texte en insistant démesurément sur la production d’images trop souvent gratuites : la Pythie qui annonce à Œdipe sa funeste destinée est amenée dans un fauteuil roulant telle une internée psychiatrique, la scène du chemin creux où Œdipe tue son père est relatée depuis le divan d’un psychanalyste, Freud apparaît sur l’écran entre deux dessins animés, Œdipe décède sur une table d’opération, etc… Si l’âpreté du propos pouvait initialement poser question quant à sa représentation, on doute pourtant que ces artifices constituent la meilleure réponse.

Autres dates :
 du 8 au 11 octobre 2008 : Théâtre de la Croix-Rousse – Lyon
 du 14 au 16 octobre 2008 : Bonlieu Scène Nationale d’Annecy
 du 21 au 23 octobre 2008 : Hexagone – Meylan
 du 26 au 30 mai 2009 : Centre National des Arts d’Ottawa

François Bousquet
le 15/02/2009

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