Rodrigo García
Rodrigo García
du 04/03/2015 au 08/03/2015
Théâtre du Rond-Point,
Paris
De plus en plus implanté en France (il a pris la tête, cette saison, du centre dramatique national de Montpellier, rebaptisé humainTrophumain), Rodrigo García voit également ses spectacles s’enchaîner sur les plateaux nationaux. Reprise de productions précédentes (Arrojad mis cenizas sobre Mickey et Gólgota Picnic), nouvelles créations par d’autres metteurs en scène (L’Avantage avec les animaux, c’est qu’ils t’aiment sans poser de questions) et propositions quasi-inédites (ce Daisy et Accidens, uniquement donnés à Annecy et Valenciennes jusqu’à présent) habitent ainsi les scènes françaises en ce début d’année 2015.
Sur un schéma proche de celui de Muerte y Reencarnación en un Cowboy (dernier spectacle que nous avions vu de l’Hispano-Argentin), deux hommes arpentent le plateau, dissertant sur de nombreuses choses, et principalement sur les travers de nos sociétés contemporaines. Aucune posture réactionnaire ou anti-moderne pourtant, l’humour étant presque systématiquement convoqué pour contrebalancer l’ensemble : dégagements sur le ski nautique, le smiley ou les influences respectives des lasagnes et de la fondue savoyarde sur les rêves. Par ce biais, García en vient à mêler trivial (à la fois dans le langage utilisé et les sujets abordés) et références davantage high culture (interprétation freudienne des rêves, Emily Dickinson, Leibniz, retable d’Issenheim, quatuor à cordes venant interpréter sur scène des morceaux de Beethoven…).
Avec deux comédiens seulement présents sur le plateau (Gonzalo Cunill et Juan Loriente), on est loin des créations de García dans lesquelles les actions y étaient si nombreuses qu’il était impossible de tout suivre en même temps. Cette fois-ci, le spectateur se trouve en capacité de prendre en compte ce qu’il se dit, d’observer ce qui se passe sur scène et de regarder les vidéos projetées sur le grand écran. De fait, tout au long des neuf tableaux (aux titres à rallonge, volontairement ironiques), viennent s’ajouter aux séquences parlées quelques images (dont un très drôle petit film dans lequel des fantômes gambadent dans un environnement pavillonnaire).
Critique sur la société, Rodrigo García se laisse parfois aller à quelques facilités, convoquant des formes devenues inévitables dans ses spectacles (jeu avec la nourriture, présence d’un hamburger McDonald’s, interventions d’animaux vivants). En revanche, c’est avec grand bonheur qu’il reprend le dispositif d’une longue liste pour justifier l’existence d’un nombre incalculable d’éléments : « Les cartes, pour connaître le monde/La graisse, pour que les côtelettes aient bon goût/L’école, pour que tout le monde pense pareil/La course à pied, pour s’arrêter reprendre son souffle/La falaise, pour avoir le vertige/Les ponts, pour unir/Le coton, pour désinfecter les plaies/Les pansements, pour protéger les plaies/Les aéroports, pour changer de vie ».
Parvenu au bout de Daisy, une impression similaire à celle régulièrement ressentie face aux spectacles de García se fait donc jour (certains ont pu considérer ce spectacle comme plus sombre que les précédents, difficile d’être aussi affirmatif) : l’appréhension globale n’est pas aisée et peu durable, mais quelques tableaux et moments persisteront assurément dans la mémoire.
Autres dates :
– du 31 mars au 2 avril 2015 : humainTrophumain - Montpellier
le 11/03/2015