31/10/2008
Carré Bellefeuille,
Boulogne-Billancourt
Alva Noto / Carré Bellefeuille / Carsten Nicolaï / Radian / Skyphone / Stefan Németh
Cette nouvelle édition du festival BBMix était l’occasion pour nous d’inaugurer ce nouveau lieu qu’est le Carré Bellefeuille, ouvert depuis tout juste un mois et sentant encore le neuf. De part son agencement, le bâtiment nous rappelle un peu la Maison des Arts de Créteil, bien que plus modeste, avec deux salles de spectacle dont un bel amphi dans lequel se déroulait cette soirée. Par contre vue la programmation à venir, peu de chances de nous y voir très souvent.
Il s’agissait pour nous de la seule date du festival pour laquelle on faisait le déplacement, principalement motivé par la présence de Stefan Németh, n’étant que peu emballé par Skyphone et ayant déjà vu ce set d’Alva Noto.
Ce n’est que vers 20h20 que débute le premier concert assuré par Skyphone. Sur scène pas de grands changements depuis 2004. On retrouve le même trio, l’un au laptop joue un peu le rôle de leader, annonçant et expliquant l’origine de chaque morceau, dirigeant un peu ses deux comparses. Les deux autres sont équipés de guitare (parfois) et basse (en permanence). Certes leur musique est très douce, fine, plus fine que dans notre souvenir d’ailleurs, et le concert débute même avec une sorte d’ambient-electronica mélodique du plus bel effet. C’est propre, les conditions d’écoute sont absolument parfaites, et confortablement assis dans ces fauteuils la musique de Skyphone s’apprécie à sa juste valeur, un peu comme dans notre salon en fait. Très peu d’aspérités, mais des traitements live des sonorités acoustiques, comme cette trompette qui se trouve un peu brutalement hachée, le groupe trouvant toujours un juste équilibre dans ces expérimentations qui ne viennent généralement pas gâcher la joliesse de leur musique. Peut-être un ou deux titres un peu plus faible avec des sons synthétiques un peu rond (mélodica, orgue), mais un joli final très enlevé pour un concert plus qu’honnête, et au final une excellente surprise.
Un petit quart d’heure pour changer le matériel et Stefan Németh prend le relais, accompagné de Martin Siewert, fidèle et génial compositeur, arrangeur, producteur de la scène viennoise. Comme pour faire suite à son superbe album, le set que présentait Németh ce soir était également intitulé Film. Pourtant on trouvera le concert assez différent du CD. Alors que l’album paraît très construit, avec une rigueur quasi mathématique malgré ses moments de fureur, le concert nous est apparu nettement plus abstrait, peut-être en raison d’une certaine part d’improvisation que l’on aura du mal à évaluer.
Németh aux machines, sampler, synthé analogique, micro capteurs, Siewert alternant entre machine et guitare pour des passages parfois très rock. Dès que des percussions ou bribes rythmiques font leur apparition, on pense à Radian, groupe dont fait partie Stefan Németh, on y retrouve assez logiquement ce son de basse synthétique, l’ensemble des éléments s’agençant avec subtilité, alternant flottement ambiants et fureur bruitiste avec un dosage parfait. Németh en solo c’est un peu comme Radian sans le groove, l’Autrichien développant avec le même vocabulaire un propos plus abstrait, plus mental.
On enchaîne avec Alva Noto et son Xerrox que l’on avait déjà pu apprécier début 2006 au Centre Pompidou. Il se trouve que l’artiste continue de faire évoluer cette pièce, et qu’au fil de ces évolutions notre impression varie. On retrouve dans un premier temps ce qui nous avait surpris à l’époque, ce mélange de nappes ambient et grésillements assez éloigné du minimalisme qui a fait la renommé de l’Allemand. Il se trouve que sur une longue première partie, trop longue sûrement, on s’ennuiera. Linéaire, manque de mouvement. On passera ensuite par un passage un peu plus apaisé, où le bruit s’estompa un peu pour laisser apparaître une mélodie répétitive, le temps d’un passage donc nettement plus ambient. Et puis petit à petit Carsten Nicolai semble trouver un juste milieu entre bruit et mélodie sur une troisième partie tout à fait convaincante où même lorsque le bruit était à son apogée, une note de piano répétitive continuait à marquer le tempo. C’est assez logiquement un final apocalyptique qui nous fut donné d’entendre, comme une lente et écrasante explosion de bruit blanc tandis qu’à l’écran une multitudes de points lumineux, comme des particules, cherchaient leur place.
Les visuels nous semblaient également plus variés qu’il y a deux ans, et forts réussis bien qu’un peu prévisibles. On se surprendra même parfois à préférer les visuels à la musique, courbes mathématiques déformées, éclatées au grès du son.
On hésitait un peu à rester pour Chrome Hoof, a priori pas vraiment notre tasse de thé. On décidera tout de même d’y jeter une oreille, histoire d’en savoir un peu plus et voir de quoi il s’agissait, et on ne quittera finalement la salle qu’après le rappel ! La musique de ce combo anglais (8 ou 9 artistes sur scène !) est un mélange incroyable de métal, d’électro, de funk, une sorte de collaboration entre Black Sabbath, Giorgio Moroder et Grace Jones. Le mystère de cette formation réside certainement dans les goûts plutôt éloignés des deux frères Leo Smee et Milo Smee, le premier étant membre du groupe de doom-métal Cathedral, le second faisant de l’électro un peu à toutes les sauces du disco à l’expérimental. Ajoutez à cela une chanteuse black qui se démène pas mal sur scène, et une instrumentation étonnante de richesse, avec en particulier un basson !
Le groupe est déguisé de tuniques à paillettes ajoutant encore au côté rétro futuriste, les claviers fleurent bon les 70s, les cuivres nous font penser à une fanfare décadente, les guitares se font parfois rageuses tandis que la chanteuse adopte un style à la fois cassant et chaleureux. On regrettera peut-être que pour un groupe soit-disant aussi déjanté, le concert paraisse finalement assez sage, les musiciens restant toujours très sérieux. Groovy, dansante, leur musique devait donner des fourmis à quelques spectateurs que le groupe invitera à danser sur scène avec eux pour un joli final, dans la joie et la bonne humeur. Funky fresh !!
le 01/11/2008