du 28/06/2025 au 31/08/2025
Passage Sainte-Croix,
Nantes
Alors que, l’an passé, la thématique « L’arbre dans la ville » avait pleinement réussi à servir de fil rouge au Voyage à Nantes (gigantesque branche de bois, belvédère, main enserrant un arbre, palmier anthropomorphe, vidéo de feu de forêt, etc…), la dénomination « L’étrange été », pensée pour cet été 2025, paraît moins propice à de telles déclinaisons. On trouva néanmoins, à titre d’étrangeté, des jeux assez intéressants sur les proportions : série Latest Version de Willem de Haan sur la fontaine de la Place Royale dans laquelle les statues historiques d’origine sont remplacées par des personnages contemporains très réalistes (un peu plus grand que la réalité) symbolisant les rivières et activités nantaises (pêcheur, salariée de la régie de transports, agent des espaces verts, étudiant, aide-soignante, vigneron…), paire de grandes bottes rangers placées par Romain Weintzem sur les marches d’un escalier dans la butte Sainte-Anne voire l’œuvre Antipodos d’Iván Argote qui masque la statue de Louis XVI placée au sommet de la colonne de la Place Maréchal-Foch et dispose un personnage descendant cette même colonne. Les habitués des propositions artistiques de la capitale ligérienne pourront aussi y trouver des échos de manifestations passées : les personnages de Latest Version auraient, ainsi, pu être exposés au Musée d’Arts il y a deux ans, quand celui-ci donna Hyper Sensible (cet ensemble dédié à la sculpture hyperréaliste), et le personnage d’Iván Argote pourrait être un cousin de ceux de Philippe Ramette qui font des Pas de côté par rapport aux socles de leurs statues.
Pour revenir au travail sur les proportions, direction le Passage Sainte-Croix, pour l’exposition personnelle d’Éléonore Saintagnan, avec son bestiaire aux dimensions surréelles : immense oiseau dressé sur une balançoire au milieu du patio, poisson gigantesque entre silure et mérou affalé dans deux salles le long de la rue, tête d’hippopotame accrochée au mur. Seul un perroquet naturalisé, accroché au-dessus d’une ouverture de porte, conserve ses proportions d’origine, les autres animaux invitant à imaginer des récits pour retracer leur parcours. La Française aide à cette perspective, en diffusant trois films, pensés autour des bêtes : Ver-Vert ou le Voyage à Nantes (fiction narrant l’histoire de l’oiseau élevé dans un couvent près de Nevers, reprise d’un poème héroïque du XVIIIe siècle), Fish Loop (courte vidéo dans laquelle le poisson échoué voit une marionnettiste s’introduire en lui et l’actionner) et Les Hippopotames de Colombie.
Recréés par les humains, manipulés depuis leurs entrailles, faussement copiés (l’empreinte d’hippopotame placée au bout d’une tige de bambou sur Hippo Tool), les animaux d’Éléonore Saintagnan n’ont pourtant pas totalement abdiqué face aux homo sapiens, puisqu’avec leurs tailles surdimensionnés, ils confrontent le public à une forme de petitesse (à l’image de la relation au Sucrier géant, en osier et papier mâché, qui occupe une partie du patio) et l’obligent à effectuer détours et contorsions, contrariant, en somme, la visite.
le 25/07/2025